27.5.06

Têtes à têtes

La culture hip-hop n'est plus réservée qu'à la rue. Lorsqu'elle fait irruption sur une scène de théâtre, la danse hip-hop nous surprend par son inventivité, sa technicité, son aptitude à se mêler à d'autres danses, son expressivité, son élégance et même sa grâce. Elle devient un art comme un autre et propose un vrai spectacle, devant lequel on reste admiratif.
Le Tarmac de la Villette proposait le spectacle Têtes à têtes, qui comportait deux pièces, chacune confrontant deux chorégraphes. Présentation faite par le Tarmac :
Têtes à Têtes met en présence deux styles de danse différents : le Hip-hop New School de Didier Firmin et Rabah Mahfoufi et le break enrichi de danse contemporaine, afro, buto, capoeïra et claquettes de Karim Amghar et Olé Khamchanla. Ces dialogues s’enrichissent du métissage et témoignent de la richesse née de la différence, conviction chère à l’esprit de la culture hip hop. Chaque duettiste est originaire d’un continent différent de son vis-à-vis et ces deux pièces se construisent autour du face à face de deux chorégraphes confrontant leurs différences, leur singularité, leurs technicités et leur personnalité propre. Ils se nourrissent d’influences culturelles et artistiques contemporaines, allant parfois jusqu’à puiser aux sources des danses tribales et rituelles. Rencontres virtuoses d’artistes, en résonance les uns avec les autres, où l’univers aérien et rythmé de Firmin-Mahfoufi voisine avec la poésie gestuelle du duo Amghar-Khamchanla.

Les deux pièces avec mes impressions et des infos sur les chorégraphes :

Time to be free, de Didier Firmin et Rabah Mahfoufi
Beaucoup d'humour et d'euphorie dans cette pièce, où je suis restée scotchée aux mouvements des deux danseurs, très synchrones, fluides et maîtrisés, parfois accrobatiques. Une évidente complicité, une musique bien rythmée, un style très américain, et une intervention de la voix de Marthin Luther King, illustrant le thème de la liberté je suppose...
Didier Firmin débute avec son groupe UNITE, puis intègre le groupe Mission Impossible. Dans le même temps, il se rend à New York et rencontre Brian Green, ce qui va lui permettre de connaître les origines de la culture House. Son approche musicale lui apporte une élégance et une gestuelle irréprochable. Il intègre ensuite le groupe Ykanji pour de nombreuses créations et de grandes tournées à l’étranger. Également DJ, il anime des soirées et manifestations dans le cadre du projet Spirit’n’Mouv.
Rabah Mahfoufi est le fondateur du groupe Mission Impossible en 1989. C’est à la Villlette que Rabah présente le 1er spectacle Hip Hop Newschool et House Kurious Elegant. Ensuite, il intègre le collectif Moov créé par le CND et présente le spectacle Come fly with us avec la musique du groupe de jazz Le Grouv Gang de Julien Loureau. Il sera aussi l’un des fondateurs du Groupe Ykanji qui présentera la création Les Glisseurs du temps ainsi que différents show sur de nombreux plateaux télé. Son parcours va faire de lui l’un des pionniers de la House Dance en France, il initiera le projet Spirit’N Moov pour développer cette culture à travers des stages, des spectacles et festivals.

(photo : Eric Legrand)

Fauchés en plein rêve, de Karim Amghar et Olé Khamchanla
Le duo Fauchés en plein rêve est une relecture des deux créations Nous sommes tous... et Deuxième temps, mémoire de la Compagnie A'corps (
lien vers le site).
Beaucoup moins ancré dans la culture hip-hop, ce spectacle a laissé plus de place à l'intériorisation et l'interprétation. Toute une partie était dansée sans musique, dans le silence des corps et des souffles. La première partie semble exprimer la volonté de se défaire de liens qui nous étouffent, peut-être de contraintes sociales qui nous enferment dans des clichés. La deuxième mettait en scène la rencontre et le rejet successifs de ces deux corps, de ces danseurs à la personnalité très différente : Karim Amghar très masculin, dur et même brutal, et Olé Khamchanla plus ambigü, délicat et souple comme un félin. L'hypothèse de leur éventuelle attirance physique reste posée.
Citation sur Deuxième temps, mémoire : «[Les chorégraphes] souhaitent, dans cette nouvelle création très masculine, exprimer les besoins, les envies, les nostalgies, les frustrations, les passions, les émotions d’un moment, une envie de se dévoiler émotionnellement et mentalement. »
Karim Amghar est originaire d'Algérie (Kabylie). Danseur depuis 1991, il intègre la compagnie TRACTION AVANT en 1995, et participa à la création Désert en 1996, break danse et buto, sous la direction artistique de Sumako Koseki et effectue une tournée internationale. Il collabore avec la compagnie contemporaine Pierre Deloche en 1997 avec la création Place. En 1998, fondateur, directeur artistique et chorégraphe de la compagnie A’CORPS, il fit une tournée nationale et internationale avec les pièces Rencontre, Canthis et Symbiose. Il fait un travail de recherche pour une nouvelle écriture chorégraphique de la danse Hip-Hop.
Olé Khamchanla est originaire du Laos, il fait ses débuts en 1990 et découvre le Hip-Hop en 1994. Il se forme avec plusieurs danseurs professionnels, en s’ouvrant à la capoeïra et au contemporain. Il travaille aussi avec différents danseurs et chorégraphes comme Fred Bendongue, Gabin Nuissier, Maître Béja Flor, Abou Lagraa, Storm, Monica Casadei, Dominique Guilhaudin. Directeur artistique, danseur et chorégraphe, il crée avec Karim Amghar, en 1998, la Compagnie A’CORPS. Leur première création sera Rencontre avec laquelle ils effectueront une tournée nationale et internationale (Rencontres des Cultures Urbaines 1999 à Paris, Cannes, Turquie…).

(photo : Eric Legrand)

Les deux pièces n'avaient aucun décor, seules les lumières colorées créaient la mise en scène.

4 commentaires:

Nathako a dit…

Trèèèès belle la photo de "Time to be free"!!
Merci pour toutes ces infos qui éclairent un peu ma vision du spectacle. Coup de coeur pour Olé Khamchanla, très beau danseur (beau dans le sens artistique)!

Doris a dit…

J'ai trouvé une deuxième photo, plus parlante, pour Fauchés en plein rêve : on voit bien comment Olé Khamchanla écarte ses bras et doigts comme le ferait un chat pour la réception, après que Karim Amghar l'ait poussé.

"Les gens de ..." a dit…

bonjour Doris , effectivement, trés belle photos de " Time to be free" . La danse Hiphop grandit et deviendra de plus en plus surprenante pour ceux qui nous immaginent sans intéligence chorégraphique. je suis ucka, danseur et chorégraphe de la compagnie "Les gens de..."merci de t'interesser et de blogguer sur notre art.

Doris a dit…

Le mouvement Hip-hop grandit... la preuve en ce moment avec l'événement "Paris Hip-hop"... Pour ma part, je n'ai jamais douté de "l'intelligence chorégraphique" de la danse hip-hop... et c'est un plaisir de pouvoir bloguer sur cet art.
Petit coup de pub pour le blog du danseur et chorégraphe Ucka :
http://perceptionlgd.blogspot.com/