4.11.06

Plongée au coeur de l'expressionnisme allemand : la peinture

Hier, je me suis fait une journée intensive sur l'expressionnisme allemand. D'abord, nous avons visité avec Nath l'exposition présentée à la Cinémathèque française, axée sur les films expressionnistes. Ensuite, il y avait une soirée thématique sur Arte, avec un documentaire sur l'expressionnisme allemand, dans l'art plus généralement avec une plus importante partie laissée à l'art pictural. Et enfin, pour clôturer la soirée en beauté, j'ai pu voir ce chef d'oeuvre qu'est Le testament du docteur Mabuse de Fritz Lang, un cinéaste majeur dont je connais davantage la période américaine.
Mais pour que ce soit plus cohérent, je ne vais pas respecter la chronologie de ma journée et plutôt m'intéresser à la logique historique : 1) le mouvement pictural de l'expressionnisme et le contexte de son développement ; 2) le cinéma expressionniste ; 3) les influences de l'expressionnisme avec un illustre exemple de film.

Le documentaire de Stan Neumann sur Arte, retraçait donc l'histoire du mouvement artistique, de ses origines avant la Première Guerre mondiale, jusqu'à l'exposition "Art dégénéré" organisée par le parti nazi en 1936.
Sous Guillaume II, l'art officiel doit obéir aux "lois de la beauté" et concourrir au "sentiment de l'harmonie". Les artistes qui peignent la laideur sont des dégénérés supérieurs, des "criminels du pinceau". A l'avant-garde du mouvement expressionniste se trouvent le fameux Cri d'Edvard Munch (1893) ou encore Autoportrait la bouche ouverte de Max Beckman (1901).
Quelques années plus tard se développe l'expressionnisme pictural. La première vague comprend deux groupes :
- Die Brücke (le pont) est formé par des étudiants à Dresde, en 1905. Ils font preuve d'un anarchisme bohème et d'une volonté de se libérer des conventions sociales. Les jeunes expressionnistes, Kirchner, Heckel, Schmidt-Rottluff, Nolde et Mueller, renoncent à la ressemblance et à la perspective et préfèrent transcrire l'expression de la vision intérieur de l'artiste. Ils s'inspirent des Fauves et de Matisse, ainsi que des arts d'Afrique et d'Océanie.
Voici une oeuvre de Heckel (1913):
Et deux oeuvres de Kirchner :
- Der Blaue Reiter (le cavalier bleu) est un deuxième groupe fondé à Münich en 1910, par Franz Marc et Wassily Kandinsky, rejoints par Paul Klee. Les peintures animalières de Franz Marc, et notamment ses Grands chevaux bleus (1911) lui ont vallu d'être considéré comme un "artiste dégénéré" par les autorités. Mais la revue Der Sturm fait la promotion de ces artistes et fait entrer le terme "expressionnisme" dans le langage courant. Le groupe découvre l'abstraction : exemple avec Les tâches noires (1923) de Kandinsky. Le style de ce groupe est moins brutal, plus harmonieux, mais il a une existence éphémère.

Une deuxième vague d'expressionnisme, plus torturé, plus macabre, naît à Berlin. Les oeuvres des artistes Ludwig Meidner, Georg Grosz et Otto Dix expriment la force chaotique et l'énergie d'une grande métropole. Des oeuvres comme La ville en feu de Meidner (1913) et Explosion de Georg Grosz adoptent un nouveau traitement de la perspective, avec des angles aigüs. Elles ont directement influencé les films expressionnistes.
La première guerre mondiale influence les expressionnistes, qui voient en elle la poursuite de leur mouvement par d'autres moyens. Ils l'accueillent avec un certain soulagement... Des oeuvres la transcrivent : Hommage à Oscar Panizza de Grosz (1917) et La nuit de Max Beckman (1919).

Avec la fin de la guerre en 1918, Guillaume II est renversé. Ludwig Meidner lance un appel contre le Bourgeois : cette révolte anti-bourgeoise deviendra une thématique récurrente dans l'expressionnisme. L'expressionnisme suscite une vague d’enthousiasme dans la République de Weimar. Mais, les affiches expressionnistes sont incomprises par les masses populaires, les travailleurs.
Alors l'expressionnisme conquiert de nouveaux terrains, du côté des architectes. Ils deviennent des architectes imaginaires, sur papier. Ils créent des projets irréalisables mais réjouissants par leur imagination. Certains d'entre eux vont donc se rapprocher du milieu du cinéma, en proposant de créer les décors de films. Le cinéma prend le relai de la peinture et du dessin...

A partir de 1921, Otto Dix établit la connection entre réalité et abstraction avec ses tableaux sur les invalides de guerre, et lance « la nouvelle objectivité », un courant post-expressionniste. Exemples :

Pour conclure sur cette partie picturale sur l'expressionnisme allemand, il faudrait enfin commenter le rapport entre les artistes expressionnistes et le parti nazi, créé en 1920. Des peintres sympathisent avec ce mouvement et vont jusqu'à y adhérer, comme Emil Nolde. Mais les nazis n’aiment pas leur peinture et cette « liberté de représenter autrement ce que tout le monde est censé voir pareil ». Pour Hitler, « la mission de l’art n’est pas de montrer l’homme sous l’image de la dégénérescence mais de combattre la degénérescence ». Adolf Ziegler a été chargé par le parti nazi de saisir ces œuvres interdites depuis 1933. La première exposition fondée sur la haine a été mise en place en 1937 : ce fut la plus grande exposition expressionniste de tous les temps. Elle fut montée à Munich puis fit le tour des villes allemandes... Une manière de dénoncer et de pointer du doigt cet "art dégénéré", mais qui en même temps lui offrait une chance inouie d'être vu par tous !

Et pour en savoir plus, Arte a concocté un dossier complet sur cette soirée "Théma" : http://www.arte.tv/expressionnisme

1 commentaire:

Ucka a dit…

Salut!
Merci pour cet éclairage sur L'expressionnisme Allemand , ça donne envie d'en savoir d'avantage. moi, j' aime beaucoup la demarche de Kandinsky qui essayait par tout les moyens de Donner à la musique une existance et une parole graphique.