14.10.07

Nous, les vivants, un film sur la grandeur d'exister

J'ai eu la chance de découvrir ce film aux antipodes des tendances du cinéma actuel, à une projection presse. Il sortira en salles le 21 novembre prochain.
Le synopsis annonce déjà des intentions très ambitieuses, presque philosophiques :
"Nous, les vivants" parle de l'Homme, de sa grandeur et sa misère, sa joie et sa tristesse, sa confiance en soi et son anxiété. Un Homme dont on se moque mais qui nous fait aussi pleurer. C'est tout simplement une comédie tragique ou une tragédie comique dont nous sommes le sujet."
Une succession de tableaux de la vie quotidienne compose cette œuvre originale du cinéaste suédois Roy Andersson. Dans une ville engloutie par le brouillard, les éclairs ou la pluie, des personnes de tous sexes, origines, statut social et âge nous sont présentées dans des situations les plus variées. Un point commun toutefois : la difficulté de communiquer avec l'autre (ou l'Autre, avec une majuscule).
Le film n’est pas fondé sur une histoire unique, mais est parcouru par cette idée générale, illustrée par des silences ou des cris, des pleurs ou des colères, des dialogues de sourds ou des chansons. Les esquisses d’histoires nous sont offertes en brut, par des images-tableaux et des phrases-clés (notamment : « Personne ne me comprend »).
Le film alterne les ambiances, entre réalisme et poésie, entre burlesque et mélancolie, ce qui permet au spectateur de toujours se laisser surprendre. Par la frontalité des personnages avec la caméra allant parfois jusqu’à une sensation de regard caméra, nous nous trouvons sans cesse pris à parti, questionnés par ces situations.
Deux rêves de personnages, l’un de mort et l’autre de mariage, ponctuent le film au début et à la fin et en constituent sans doute le point d’orgue. Ils représentent les peurs et les désirs des hommes.
La peur de l’accusation d’une part, le désir de reconnaissance d’autre part, sont transcris à l’image par des plans d’une absurdité qui marque l’esprit. Ne citons que les bières bues lors d’un procès par les juges avant de rendre leur jugement ; les pop-corn avalés par les spectateurs qui assistent à la scène de mise à mort du personnage sur la chaise électrique. Dans cette séquence de rêve on entrevoit une critique de la société spectacle où le malheur des uns constitue le divertissement des autres.
La proximité avec le théâtre se fera ressentir tout au long du film : l’importance du décor et des costumes, filmés en grand angle ; l’absence de découpage des séquences mais aussi l’intonation et la forte puissance des voix des personnages.
La photographie très spéciale, par ses tonalités verdâtres et la lumière très douce qui enrobe les personnages et supprime toute trace d’ombre, donne au film une dimension aérienne, presque surréaliste.
Un bémol toutefois, à force d'inclure des procédés de distanciation entre les scènes filmées et le spectateur, il se révèle difficile de réellement "entrer" dans le film. Mais n'est-ce pas également ce qui est souhaité par le réalisateur ? Une réflexion, et non une expérience ?

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