Yumurta, le temps de la nature et de l'amour
Après avoir vu quelques films avec des histoires crues, grotesques ou caricaturales, il fait bon revenir vers un cinéma plus réaliste, plus épuré, plus poétique aussi. Dans Yumurta, tout est dans la suggestion, la retenue, les non-dits, les regards bienveillants.
A la mort de sa mère, Yusuf, libraire à Istanbul, retourne dans sa ville natale, Tire, qu'il n'a pas visitée depuis des années. Une jeune fille, Ayla, l'attend dans la maison familiale ; elle s'occupait de la défunte depuis cinq ans mais Yusuf ne la connaît pas. Comme beaucoup d'autres habitants, Ayla voue une admiration muette et fascinée à Yusuf, qui avait connu un début de notoriété au moment de la publication d'un ouvrage de poésie. Ayla a quelque chose à demander à Yusuf : accomplir le rite sacrificiel que sa mère n'a pas eu le temps de faire avant de mourir. Incapable de s'opposer au sentiment étouffant de la culpabilité, Yusuf finit par accepter...
Yusuf, un homme habitué au rythme urbain, redécouvre à Tire la nature, la vie rurale, le temps qui a une autre durée. Venant du monde "moderne" que représente Istanbul, sous l'insistance d'Ayla et pour honorer la mémoire de sa mère, il est contraint de faire un sacrifice qu'il ne comprend pas, auquel il ne croit pas. Tout le film est construit autour de ce "choc culturel", entre tradition fortement ancrée et modernité, qui représente bien les deux visages de la Turquie d'aujourd'hui.
De retour dans un environnement auquel il n'est plus habitué, mais qui reste habité par d'anciennes connaissances, Yusuf réagit par la passivité, qui se matérialise par... le sommeil. Il dort beaucoup et n'importe où, sous un arbre, dans un champ, chez le coiffeur, et aussi bien sûr dans son lit... Il tombe raide à un moment de vertige soudain, ou est obligé de s'immobiliser pendant des heures face à un chien de troupeau agressif. Et lorsqu'il ne dort pas, Yusuf fume (comme un pompier !), comme pour apprivoiser ce temps qui ne passe pas. Ce n'est qu'en présence d'Ayla que, progressivement, s'instaure un lien invisible de complicité et d'attirance, à travers les thés partagés et les trajets en voiture, malgré leur grande différence d'âge.
Desservi par une très belle photographie et des acteurs très justes (et beaux dans leur simplicité), le film respire la beauté poétique. On y trouve à la fois le sens du détail, notamment dans les scènes d'intérieur, et le sens de la contemplation dans les scènes d'extérieur.
La grande immobilité et le manque de rebondissements décevront sans doute un public non averti. Dans cette immensité de temps vacant et d'espace vide, le spectateur risque de se perdre, de ne pas comprendre le sens du film. Qui est concentré dans son titre : "Yumurta", "l'oeuf", qui symbolise à la fois la nature et la vie.
En sortant de la séance, je remarquai, sur l'affiche française, cette citation d'Arthur Rimbaud :
"Mais l'amour infini me montera dans l'âme,
Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la nature, heureux comme avec une femme."
A la mort de sa mère, Yusuf, libraire à Istanbul, retourne dans sa ville natale, Tire, qu'il n'a pas visitée depuis des années. Une jeune fille, Ayla, l'attend dans la maison familiale ; elle s'occupait de la défunte depuis cinq ans mais Yusuf ne la connaît pas. Comme beaucoup d'autres habitants, Ayla voue une admiration muette et fascinée à Yusuf, qui avait connu un début de notoriété au moment de la publication d'un ouvrage de poésie. Ayla a quelque chose à demander à Yusuf : accomplir le rite sacrificiel que sa mère n'a pas eu le temps de faire avant de mourir. Incapable de s'opposer au sentiment étouffant de la culpabilité, Yusuf finit par accepter...
Yusuf, un homme habitué au rythme urbain, redécouvre à Tire la nature, la vie rurale, le temps qui a une autre durée. Venant du monde "moderne" que représente Istanbul, sous l'insistance d'Ayla et pour honorer la mémoire de sa mère, il est contraint de faire un sacrifice qu'il ne comprend pas, auquel il ne croit pas. Tout le film est construit autour de ce "choc culturel", entre tradition fortement ancrée et modernité, qui représente bien les deux visages de la Turquie d'aujourd'hui.
De retour dans un environnement auquel il n'est plus habitué, mais qui reste habité par d'anciennes connaissances, Yusuf réagit par la passivité, qui se matérialise par... le sommeil. Il dort beaucoup et n'importe où, sous un arbre, dans un champ, chez le coiffeur, et aussi bien sûr dans son lit... Il tombe raide à un moment de vertige soudain, ou est obligé de s'immobiliser pendant des heures face à un chien de troupeau agressif. Et lorsqu'il ne dort pas, Yusuf fume (comme un pompier !), comme pour apprivoiser ce temps qui ne passe pas. Ce n'est qu'en présence d'Ayla que, progressivement, s'instaure un lien invisible de complicité et d'attirance, à travers les thés partagés et les trajets en voiture, malgré leur grande différence d'âge.
Desservi par une très belle photographie et des acteurs très justes (et beaux dans leur simplicité), le film respire la beauté poétique. On y trouve à la fois le sens du détail, notamment dans les scènes d'intérieur, et le sens de la contemplation dans les scènes d'extérieur.
La grande immobilité et le manque de rebondissements décevront sans doute un public non averti. Dans cette immensité de temps vacant et d'espace vide, le spectateur risque de se perdre, de ne pas comprendre le sens du film. Qui est concentré dans son titre : "Yumurta", "l'oeuf", qui symbolise à la fois la nature et la vie.
En sortant de la séance, je remarquai, sur l'affiche française, cette citation d'Arthur Rimbaud :
"Mais l'amour infini me montera dans l'âme,
Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la nature, heureux comme avec une femme."
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