30.6.08

La Zona, zone protégée ou zone de non-droit ?

Rattrapage : cela faisait longtemps que je voulais voir le film mexicain La Zona, prioriété privée, premier long métrage de Rodrigo Plá sorti en mars dernier. Il fut à la hauteur de mes espérances, un excellent film sur la sécurité, la peur et la violence.

Le synopsis (version longue, mais plus parlante !) :
Un adolescent, Alejandro, vit depuis toujours dans La Zona, une cité résidentielle aisée au coeur de Mexico, entourée de murs imposants et protégée par un service de sécurité privé. Une nuit, trois adolescents des quartiers pauvres voisins pénètrent dans l’enceinte de La Zona et s'introduisent par effraction dans une des maisons. Mais le cambriolage tourne mal : la propriétaire, une vieille femme, est tuée, et sa domestique, qui parvient à fuir les lieux, prévient la sécurité. Les vigiles interviennent avec rapidité et brutalité : deux des jeunes intrus sont abattus. Le troisième, Miguel, s’échappe, en s’enfonçant encore davantage au coeur de La Zona.
Un groupe de résidents se réunit alors dans la maison des parents d’Alejandro ; ils prennent rapidement la décision de cacher l’incident aux autorités, de traquer l’intrus eux-mêmes et de rendre ainsi leur propre justice. La chasse à l’homme commence.
Les résidents de La Zona - parents et enfants confondus - sont emportés dans un tourbillon frénétique où se mêlent peur, folie et flambée de violence. Ceux qui marquent leur désaccord sont d’abord traités avec suspicion, puis avec une hostilité ouverte.
Lorsqu’Alejandro tombe par hasard sur Miguel, réfugié dans la cave de sa maison, il ne peut se résoudre à livrer l’adolescent terrifié. Parallèlement, la police, avertie par une dénonciation, commence à mener l’enquête sur la disparition des adolescents, mais se heurte au manque de collaboration des résidents.
Alors qu’un vent grandissant de paranoïa souffle sur La Zona, Miguel jure à Alejandro qu’il n’a jamais tué personne, et, contre toute attente, une complicité se noue entre les deux garçons. Désorienté et déchiré entre ses convictions et l’attitude de sa famille, Alejandro décide de l’aider à s’enfuir. Mais l’étau s’est déjà dangereusement resserré…


La Zona est une prison dorée, sorte de banlieue pavillonnaire préservée de la misère par un portail géant, des grillages et contrôlée par la vidéosurveillance. Au lieu de protéger de la violence, cette barrière avec le monde extérieur accentue les crispations entre voisins, et au sein même d'une même famille. Comme dans l'extrait ci-dessous :


Les résidents de cette zone, bénéficiant de droits particuliers, sont confrontés à un dilemne : faire confiance dans la police ou faire justice eux-mêmes. Ceux qui ne sont pas d'accord avec la décision de la majorité (la "communauté") devront s'y conformer. La police elle-même a deux visages : celui de l'inspecteur qui décide de mener l'enquête coûte que coûte, et celui de son supérieur, qui se satisfera d'une coquette somme d'argent pour laisser les résidents "tranquilles" et fermer les yeux sur les meurtres perpétrés dans l'enceinte de la Zona.
Le thriller, servi par de très bons acteurs, trouve un dosage équilibré entre suspense et drame psychologique. Il offre une réflexion sur la notion très actuelle de sécurité, qui prend souvent le pas dans nos sociétés "paranoïaques" sur les libertés individuelles. Par peur et pour sauvegarder cette sécurité, qu'est-on prêt à faire ? Se taire, corrompre, tuer ? Renier la dignité humaine ? Ce ne sera plus l'avis d'Alejandro... qui représente un peu, par son évolution au fil des événements, l'espoir du changement de mentalité dans ce monde fermé sur lui-même.

Et pour en savoir plus sur le film ou lire l'entretien avec le réalisateur et la co-scénariste : voir le dossier de presse en PDF.

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